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NO COMMENT



Cette œuvre numérique (janvier 2005) de grand format vertical (203x107 cm) est imprimée avec des encres UltraChrome à pigments encapsulés sur une toile Canvas.


Toutes mes œuvres expérimentent le multicouche, ce que j’appelle aussi le feuilletage de l’espace, l’étagement des plans picturaux. Ce propos, constant dans mon travail quel que soit le médium (art numérique, peinture, sérigraphie, photographie, vidéo, installation, œuvres audio) et nécessitant des process, des mises en œuvre spécifiques, a pour but de rendre compte autrement de la profondeur de l’espace, de tenter une profondeur tactile et non perspectiviste. Une micro- profondeur, un trouble perceptif où figure et fond sont donnés d’un bloc, où l’on ne peut décider de ce qui est devant et de ce qui est derrière. Un espace insitué où tout semble flotter. Une lisible complexité.


Cette œuvre-ci est composée de trois couches distinctes : nu masculin, lettrage, anneaux de Newton. Trois calques dont deux « captures numériques » (appareil photo numérique pour le nu, microscope électronique relié à une caméra digitale pour les anneaux) et un « Outil Texte (T) ».


Le nu masculin est à l’échelle 1/1 (179 cm). Un post-it remplace la sempiternelle feuille de vigne. Nu de nature classique, pour ne pas dire néo-académique, tant par sa posture que par sa morphologie, corps sur la pointe des pieds légèrement basculé vers l’avant, doigts écartés, il semble s’appuyer sur une vitre invisible où serait inscrite, all over, la phrase (le commentaire) « NO COMMENT ».



Cette phrase est séquencée en trois lignes de trois lettres chacune (NOC/OMM/ ENT) qui la rend incompréhensible à première lecture, ceci afin d’en retarder le sens. Ce codage permet d’avoir une première saisie purement visuelle : un nu, des lettres semi- transparentes, un fond coloré d’anneaux irisés. Un corps en léger déséquilibre avant entre lettres et irisation.


Ce n’est qu’après, je l’ai vérifié récemment, que le texte est décrypté par le regardeur et que le titre, inclus dans l’œuvre, devient constitutif de celle-ci. Le corps s’appuie sur un vide, une suspension de jugement, une absence de sens : no comment, sans commentaire. Le corps est là, présent, rendu, c’est tout. Il n’est pas en représentation. Il n’est pas conscient de lui-même mais des exigences de la pose. Et c’est ainsi qu’il ne pose pas, tout occupé à garder l’équilibre, à redresser le menton, à positionner ses mains. Il n’y a pas de modèle, pas d’anonymat. Tout nu est un portrait. Un homme se tient debout, dans cette vacuité colorée. Oublieux de lui-même. De son ego. De ses ergots. Son regard, son expression sont autres : désarmés, nus, naked. Nu nu, renonçant à représenter, à se présenter, à figurer, présence nue.



Philippe de Croix

3 février 2005

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